Communiqué de l’ADBU relatif au Plan Bibliothèques universitaires annoncé par la ministre de l’Enseignement supérieur et de la Recherche le 17 février 2010

L’ADBU (Association des directeurs et des personnels de direction des bibliothèques universitaires et de la documentation) se félicite que la ministre de l’Enseignement supérieur et de la Recherche ait consacré une conférence de presse aux bibliothèques et à la documentation universitaire.

Un tel événement était attendu depuis longtemps.

Il est en effet significatif que, même dans le contexte de la loi Libertés et responsabilités des universités, l’État confirme ainsi la nécessité d’une politique nationale dans ce domaine essentiel pour la compétitivité internationale de notre système universitaire et la réussite des étudiants, domaine dans lequel les gains d’efficience passent largement par des progrès dans la mutualisation. Un grand nombre de points seront naturellement à analyser en concertation avec la Conférence des présidents d’université, certaines mesures ne pourront se concevoir que dans le cadre de l’autonomie universitaire.

L’ADBU est également satisfaite de constater que les déclarations de la Ministre esquissent une politique sur plusieurs axes essentiels, en ne se limitant pas au seul thème des heures d’ouverture que le Président de la République avait abordé le 11 janvier dernier lors de la cérémonie des vœux présentés aux secteurs de l’éducation, de l’enseignement supérieur et de la recherche. L’association pourra donc d’autant plus regretter que le dossier de presse remis ne fasse référence dans son titre qu’à la vie étudiante, alors que son contenu se veut plus ambitieux, articulé en 5 engagements-phare*.

Horaires et vie étudiante

Pour la question des horaires, des progrès notables ont déjà été faits par les établissements, la moyenne nationale étant aujourd’hui de 58 heures par semaine et un certain nombre étant déjà ouverts plus de 70 heures. Ainsi les bibliothèques universitaires peuvent d’ores et déjà passer comme emblématiques de la disponibilité du service public de l’enseignement supérieur vis-à-vis de ses publics. La volonté constante de l’État est manifeste, mais s’accompagne généralement d’un soutien limité dans le temps. Tous les progrès accomplis grâce à l’engagement du personnel des bibliothèques universitaires constituent une étape, et chacun est convaincu que l’on peut faire mieux et plus dans ce domaine ; celui-ci doit être abordé sans préconçu idéologique et sans vision déconnectée de la réalité.

Pour L’ADBU, l’extension des horaires d’ouverture suppose : 
- une prise de conscience, de la part de l’État comme de la part des universités, de leurs responsabilités juridiques et administratives : au moment où l’on débat de questions d’insécurité, il serait irresponsable, contraire au bon sens et à la réglementation de confier la gestion des équipements aux seuls moniteurs-étudiants dont le recrutement ne saurait être considéré comme la panacée universelle, 
- une gestion favorable des heures supplémentaires et récupérations si l’on veut mobiliser des équipes comme à la Bibliothèque nationale de France ou à la Bibliothèque publique d’information-Centre Beaubourg ; à ce titre l’annonce faite par la ministre sur les heures supplémentaires est un signe réellement positif, 
- un accompagnement pérenne de la part de l’État : à cet égard les universités devront être attentives au caractère pluriannuel de ses engagements financiers, 
- un accompagnement logistique de la part des établissements : les bibliothèques ne peuvent ouvrir en nocturne ou le dimanche sans que des structures en charge des urgences informatiques ou immobilières ne soient prêtes à intervenir pour pallier tout problème de réseau, de chauffage, etc. 
- une analyse par site universitaire qui puisse associer les villes et le potentiel des bibliothèques publiques de centres-villes, puisque certains campus sont désertés après les cours ; ces derniers sont parfois quasi-inexistants dès le vendredi après-midi : l’économie du temps doit être donc pleinement et réellement intégrée dans les préoccupations des universités et les politiques de sites.

Politique documentaire, formation et recherche

En effet, la liste des points évoqués par la ministre, si elle montre la nécessité d’une politique globale, ne saurait tenir lieu de politique par elle-même. Manquent encore quelques certitudes sur les moyens à dégager pour qu’enfin, les bibliothèques universitaires françaises puissent prétendre se situer à la hauteur de leurs homologues anglo-saxonnes ou allemandes, notamment en termes de dépense d’acquisition documentaire par étudiant et par enseignant-chercheur : les universités qui en ont l’ambition doivent y être incitées, dans le plein respect de leur nouvelle autonomie.

A ce titre, l’ADBU note avec intérêt la nécessité affichée d’une coordination entre l’Enseignement supérieur et la Recherche pour la documentation électronique. Elle s’étonne donc d’autant plus de ne pas voir évoqué explicitement dans le Plan Bibliothèques universitaires le thème des licences nationales, redoutant un repli du ministère sur la question. Une référence précise aux collections rétrospectives aurait également évité une ambiguïté qui semble entretenue.

Les professionnels des bibliothèques et leurs usagers attendent aussi des mesures volontaristes touchant au livre numérique : l’annonce d’un plan prioritaire de numérisation du patrimoine documentaire universitaire mérite d’être saluée, mais des mesures fortes visant à ce que se développe très vite une offre de manuels universitaires francophones conséquente sont une impérieuse nécessité. De ce point de vue, le rapport Réussir l’école numérique élaboré par M. Jean-Michel Fourgous, député, et récemment remis au ministre de l’Education nationale affiche de toutes autres ambitions : publication bimédia de tout manuel scolaire dès 2011, exception pédagogique au droit d’auteur afin de favoriser l’utilisation pédagogique du numérique. Il y a urgence à ce que ces objectifs soient étendus au domaine de l’enseignement supérieur, et accompagnés financièrement.

L’ADBU se félicite en revanche que les collections physiques n’aient pas été naïvement ignorées et que la ministre ait évoqué avec précision la création en région d’un réseau de centres de conservation partagée, à l’instar de ce qui existe pour l’Ile-de-France (NB : pour le CTLes de Marne-la-Vallée, il n’apparaît pas clairement s’il s’agit d’un doublement ou d’un triplement de sa capacité de stockage).

Les acteurs de la documentation au service de la communauté universitaire

Malgré l’hommage rendu de fait par la ministre à l’engagement professionnel des personnels de bibliothèque universitaire, l’ADBU constate l’absence de référence aux questions de personnel et de formation, en dehors de ce qui est dit des moniteurs-étudiants. A cet égard, elle apprécie le propos tenu à la tribune en présence de la ministre par Mme Marie-Christine Lemardeley, présidente de l’Université de la Sorbonne Nouvelle-Paris III, sur l’importance du métier et la prudence à vouloir régler tous les problèmes d’ouverture par le biais des moniteurs-étudiants.

Dans le même ordre d’idées, la fonction des professionnels de la documentation dans la politique des archives ouvertes, dans la mise en place des outils pédagogiques numérisés, dans l’interaction entre production et diffusion des savoirs n’a pas été suffisamment mise en valeur malgré la référence aux learning centers dont la ministre appelle de ses vœux une francisation du concept, via la réflexion conduite par l’Inspection générale des bibliothèques.

Enfin, si l’ADBU ne peut que partager le sentiment de la ministre sur la qualité du travail réalisé par l’IGB, si elle ne peut qu’approuver son souhait de voir confirmer l’évolution récente de l’AERES dans son approche de la documentation, elle plaidera pour que les missions assurées par l’administration centrale elle-même ne soient pas passées sous silence, notamment en termes d’évaluation de la performance des bibliothèques universitaires, à travers une ESGBU (Enquête générale statistique des bibliothèques universitaires) renouvelée, mais ambitieuse. Ces missions sont de fait les garantes les plus sûres de la pérennité de l’action de l’État en faveur des bibliothèques universitaires et de leurs publics, chercheurs, enseignants-chercheurs et étudiants.

Le 19 février 2010

* NB : Le dossier de presse distribué à l’issue de l’allocution ministérielle fait état de 5 engagements-phare déclinés en 13 points. Dans son allocution elle-même, Madame Pécresse a fait référence à 3 grands objectifs et à 10 grandes mesures.

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